Quand il parle de la programmation de « son » festival, Yvann Alexandre précise à chaque fois qu’il a invité trois grandes dames : Christine Bastin, Louise Bédard et Ingeborg Liptay.
Christine Bastin, on attend avec impatience d’entrer dans son univers : ce sera demain. Louise Bédard est une personnalité exceptionnelle au regard de la place qu’elle occupe dans l’émergence de la danse contemporaine au Québec. Mais, au vu de la série de performances (des pièces « en chantier ») qu’elle a présentées depuis l’ouverture d’Effervescence dans différents lieux de la ville, on est moins convaincu.
Reste Ingeborg Liptay à qui la journée de mercredi était en grande partie consacrée. Et là, on se dit que le qualificatif de « grande dame » est un peu faible. On dirait bien « monument » pour ce que ce mot suggère d’imposant, de central, d’« évident » dans un paysage. Mais ça ne colle pas du tout avec la légèreté et la mobilité de la dame.
Dans ses interventions parlées lors du « point danse » mardi après-midi ; et dans la soirée, dans son émouvant solo Bird, pour les oiseaux, tout en retenue, en douceur, Ingeborg Liptay, du haut de ses 76 ans, en impose par sa sérénité rayonnante.
Mais c’est par l’incroyable énergie de sa pièce Lumière du vide qu’elle a fait se lever toute la salle à l’issue de son spectacle, au Jardin de Verre. Sur le rock lancinant de Tool, les quatre interprètes de Lumière du vide dansent, dansent, dansent.
La pièce est une création récente (elle date de l’an dernier), mais avec cette sorte de mouvement perpétuel, toujours rythmé, qui l’anime, elle renoue avec l’esprit du « ballet contemporain » des années soixante-dix ou quatre-vingt : une danse spectaculaire bien que dépouillée de tout accessoire, une danse physique, mobile, avec des mouvements d’ensemble d’une parfaite cohésion. Une danse d’une éternelle jeunesse…
Thierry Mallevaes